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mercredi 11 juin 2014

France, compétitivité en berne

Depuis quelques décennies la France, hormis quelques productions très spécialisées, disparaît progressivement du paysage du commerce international. Une comparaison avec l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni illustre ce propos.
Comment mesurer la compétitivité ? Chacun s’accorde à distinguer entre compétitivité coût et compétitivité hors coût. La difficulté est de trouver des indicateurs pour traduire cette distinction. Ici on procède comme suit :
  1. La compétitivité hors coût est mesurée par la part de la valeur ajoutée des activités exportables dans la valeur ajoutée totale. cet indicateur a été choisi pour rendre compte de la dotation en facteurs de production. En effet, un pays ne peut exporter que ce qu’il produit. la structure de la production est donc une information indispensable pour comprendre les performances du pays sur les marchés internationaux. Les activités sont divisées en biens exportables (agriculture sylviculture pêche, industrie hors construction branches A et B à E) et en services (information communication banques et assurances branche J).
  2. La compétitivité coût en valeur est mesurée par le rapport de la valeur ajoutée au coût de la main d’œuvre. (Hors agriculture pour laquelle le prix des intrants est primordial). Cet indicateur permet de rendre compte du rapport de la productivité unitaire[1] du travail à son coût unitaire. Cet indicateur permet de plus d’éviter la difficulté de la mesure du temps de travail effectif.
  3. Les performances sont mesurées d’une part, par les exportations de biens et de services en euro par habitant et d’autre part, par le solde de la balance commerciale (Biens) et le solde des transactions courantes (services).
Les données sont celles du 3ème trimestre 2013 (Eurostat)
Commençons par les performances sur les biens.
Comme on le constate sur le premier graphique les exportations allemandes sont florissantes et dominent largement celles des autres pays. L’Italie se place deuxième, talonnée par la France
Graphe 1 :



Ces différentes performances tiennent plus à la dotation en facteur de production qu’à la compétitivité coût.
Graphe 2 :


En effet la part des activités de biens susceptibles d’être exportés s’élève à plus de 26% de la valeur ajoutée totale alors qu’elle plafonne autour de 20% pour l’Italie et l’Espagne (proche de la moyenne de l’UE). La France et le Royaume-Uni se situent en dessous des 15% ce qui confirme la désindustrialisation de ces deux pays. Depuis le 1er trimestre 2000 la part de l’Allemagne passe de 25% à plus de 26% pendant que la France passe de 20% à moins de 15% et que les autres pays perdent eux-aussi entre 5 et 6 points.
Mise à part l’Espagne où le coût de la main d’œuvre est particulièrement bas les autres pays se situent dans un écart de quelques centimes d’euros, le rapport valeur ajoutée sur coût de la main d’œuvre n’apparaît pas être décisif.
Graphe 3:

Mais l’évolution est assez inquiétante. Depuis le 1er trimestre 2000, ce rapport Valeur ajoutée sur coût de la main d’œuvre a gagné 15% en Allemagne, 23% en Espagne pendant que pour la France le rapport perdait 10%, la perte est de 15% pour l’Italie et le Royaume-Uni.
Si aujourd’hui il ne semble pas y avoir de grands écart dans le rapport valeur ajoutée sur coût de la main œuvre, il y en a lorsqu'on regarde la rentabilité d’exploitation (excèdent brut d’exploitation sur valeur ajoutée brute) : l’industrie manufacturière est 1.3 fois plus rentable en Allemande qu’en France, le rapport passe à 1.5 pour l’Italie et l’Espagne, et plus de deux fois pour le Royaume-Uni.
L’ensemble de ces points explique la balance commerciale par habitant des différents pays 
Graphe 4 :


Passons aux services, pour lesquels la hiérarchie n’est pas la même. Si les allemands sont les champions de l’industrie les britanniques le sont pour les services. Même si les écarts sont moins nets
Graphe 5 :


Les écarts étant moins importants, la dotation en facteurs c’est-à-dire la part de la valeur ajoutée de services exportables dans la valeur ajoutée totale paraît moins explicative des performances, à l’exception du Royaume-Uni.

Graphe 6 :



Cet indicateur reste remarquablement stable de 2000 à nos jours. Le Royaume-Uni est passé de 12 à 14%, l’Allemagne a perdu 1 point, les autres pays n’ont pratiquement pas bougé.

La compétitivité coût mesurée par le rapport de la valeur ajoutée au coût de la main d’œuvre présente des écarts plus importants que pour la production des biens, mais ceux-ci restent modérés.

Graphe 7 :


L’Italie se distingue par un ratio plus élevé, mais cela n’influe pas sur ces exportations même si on peut imaginer que cela puisse lui permettre de résister sur son marché intérieur comme le laisse suggérer les performances en termes de balance des transactions sur les services.
Graphe 8:

Au total on s’aperçoit que sur les cinq pays seule l’Italie a une balance excédentaire tant sur les biens que sur les services. L’Allemagne compense largement son déficit sur les services par son excédent sur les biens, l’Espagne compense de manière inverse son déficit sur les biens par son excédent sur les services. Ces trois pays sont globalement excédentaires l’Allemagne sur un rythme d’environ 442€ par habitant et par trimestre, l’Espagne de 232€, l’Italie de 201€. La France et le Royaume-Uni sont déficitaires respectivement de 77€ et 276€ par habitant par trimestre. La France détient le déplorable record du plus mauvais rapport valeur ajoutée sur coût sur les services comme sur les biens et de la plus faible rentabilité d’exploitation.
Pour le détail des évolutions plus longues voir :




[1] http://www.oecd.org/fr/social/travail/18454123.pdf

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